Un peu d’histoire
Alors que les communications sont en plein boom et qu’on câble à tout-va pour installer télégraphes et autres téléphones des deux côtés et au fond de l’Atlantique, et que les ondes électriques commencent à circuler dans les airs, un certain Albert Hanson dépose discrètement en 1903 un brevet qui va poser les bases du principe du circuit imprimé. Tout est déjà là : pistes conductrices, matériau isolant, et même pastilles permettant de lier une face à l’autre. Dans les décennies qui suivent, Thomas Edison et de nombreux autres scientifiques travaillent aussi sur cette technique et l’améliorent.
Extrait du brevet anglais de Albert Hanson.
Glorieux passé qui ne sera mis à profit que bien des années plus tard à des desseins bien moins nobles, au service des projectiles anti-aérien alliés et autres mines allemandes. Il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale et la levée des secrets militaires pour voir l’invention utilisée bien plus largement dans le domaine de l’électronique, coïncidant à un an près avec l’invention du transistor. Depuis, le circuit imprimé est utilisé dans tous les appareils électroniques qui nous entourent, les téléphones, les ordinateurs, les tablettes, les amplis, les pédales d’effet et autres micro-ondes.
Mais ne nous étendons pas plus sur l’historique et revenons à la question posée par le titre de cet article : « Pourquoi je n’utilise pas de circuits imprimés ». Est-ce par snobisme, par pure nostalgie, pour des raisons techniques ? C’est un peu tout ça à la fois.
Techniques de montage
Des techniques de montage, il en existe des dizaines. Du montage point-to-point, qui consiste en l’assemblage le plus simple possible, on utilise les composants eux-mêmes pour relier les différents éléments du circuit entre eux, au plus court. En passant par les montages sur barrettes ou supports de montage qui permettent de rationaliser le montage en alignant les composants au maximum sur une plaque de carton bakélisé ou tout autre matériau isolant équipé de plots sur lesquels on peut venir souder les composants et les fils de liaison.
Terminons par les fameux circuits imprimés, le montage « through-hole » : les composants sont installés sur le circuit, leurs fils traversant le circuit pour être ensuite soudés directement sur les pistes. Le circuit imprimé à montage en surface ou SMD (pour Surface-Mounted Devices) : ici, les composants ont des formes qui permettent le montage directement sur le circuit, réduisant drastiquement la surface de montage.
Les deux premières techniques sont bien sûr liées aux balbutiements de l’électronique, que l’on pourra qualifier d’ère « paléoélectronique ». Les composants sont gros, les circuits à lampes particulièrement simple : personne ne se pose de question et on monte « en l’air ». L’avantage procuré par ce type de montage est double, on éloigne le risque de couplage capacitif ou de chauffe interne tout en permettant un plus grand accès au circuit pour effectuer de la maintenance. Le montage sur plaque à cosses est lui une suite logique et pratique : la rationalisation au service de l’industrie. Il est beaucoup plus simple de produire ces circuits en série.
Le circuit imprimé arrive lui comme une solution à deux problèmes : la miniaturisation des composants et donc des circuits, mais aussi l’arrivée du transistor. Les plaques de circuit imprimé sont faciles à produire, elles permettent d’éviter de nombreuses étapes fastidieuses pour les monteurs et résistent particulièrement mieux aux chocs et aux mouvements que leurs homologues câblés à l’ancienne.
Oui, monter un ampli à lampes ou à transistors en câblage volant est véritablement du snobisme. Mais une forme qui peut parfaitement se comprendre. Pour ma part, je vois mon travail comme celui d’un artisan et non comme celui d’un bureau d’étude qui va sous-traiter le travail à une équipe de monteurs qualifiés. Câbler un ampli ou une pédale d’effet est pour moi un moment privilégié, c’est là que s’expriment toutes les connaissances acquises et qu’intervient le savoir-faire de l’artisan électronicien. Chaque montage est un peu et se doit d’être unique. C’est exactement ce pourquoi je travaille pour mes clients.
Cela ne jouera pas (ou peu, je laisse le bénéfice du doute aux plus audiophiles des lecteurs) sur le résultat sonore final, mais l’ensemble du circuit sera parfaitement cohérent et facilement modifié lors des maintenances inévitables. Car oui, c’est là un point particulièrement important : depuis plus de dix ans, je répare et je restaure du matériel électronique : amplis, magnétos, pédales d’effet, radios.
Difficile d’évaluer le nombre d’appareils en panne qui sont passés sur mon établi. Que ce soit des amplis pour guitare dans le pur style années 90, des amplis hi-fi des années 50, des enregistreurs des années 30 ou encore le poste radio dernier cri, j’ai eu la chance de pouvoir mettre les mains dans à peu près tout et j’en suis arrivé à une conclusion particulièrement simple : les circuits imprimés vieillissent très mal et n’offrent que peu de fiabilité lorsqu’il est question de maintenance. Ceci est particulièrement vrai avec les montages qui comportent des lampes, j’ai tellement vu de mauvais choix qui allient PCB et lampes que je n’ai qu’à fermer les yeux pour me remémorer des histoires d’horreur.
Conclusion
Par mon travail et mon choix de travailler sans circuit imprimé, je veux perpétuer ce savoir-faire paléoélectronique. Les ingénieurs pensaient leurs appareils pour qu’ils soient facilement modifiables, réparables. Non pas que leurs réalisations tombaient souvent en panne, bien au contraire, mais tout simplement dans un esprit qui semble tout à fait logique : « Vous achetez mon matériel pour une vie », ou même pour plusieurs vies, ajouterai-je. Difficile d’estimer le nombre d’appareils électroniques de plus de 50 ans qui fonctionnent encore parfaitement, des décennies plus tard.
Le choix circuit imprimé vs câblage à l’ancienne est au final un choix purement artistique et personnel. Il existe de superbe réalisations montées en SMD sur des circuits multicouche et d’horrible tas de câbles informes montés avec composants hors de prix qui ne sonnent pas tripette. Monter du matériel Acouphonic sur circuit imprimé ne me viendrait jamais à l’esprit même si l’idée est tentante. C’est par nostalgie et passion que je suis heureux de continuer à travailler comme le faisaient les électroniciens des années 50. Et c’est un peu dans l’esprit du temps non ? Je préfère laisser des appareils qui seront toujours réparables que des déchets à nos générations futures.
Bonjour cher passionné.
Je vois que je suis pas le seul qui aime les vieux instruments de mesure électronique.
Certe je fais autant de montage sûr circuit imprimé que aussi montage à anciennes.
J’aime restauré les vieux TSF car ma douce moitié les collectionne.
Et eu l’occasion de réaliser un salon sur la collection de vieux instruments de mesure des années 30 au années 80, avec aussi émission militaire et récepteur TSF.
C’est toujours pour moi un plaisir de lire vos réalisations.
Pour info belle collection de vieux instruments chez moi aussi.
Au plaisir de vous lire.
Cordialement François
Bonjour François, merci du message !
Bonjour,
j ai découvert avec grand intérêt votre travail dans l article de REVERB, je ne sais pas quel âge vous avez, moi je suis de 1959, mais nos parcours se ressemble , mon père qui était électronicien amateur mais éclairé reparaît des postes de TSF après la guerre, puis s est mis a construire nos téléviseurs que l on pouvait trouver en kit a l époque. J ai commencé la guitare basse à 17 ans en jouant sur un poste de TSF Grandin un peu bidouillé (on avait augmenté le gain de l entrée Pick up!!), pis j ai commencé à mettre le nez dans mon premier ampli a lampe , un DAVOLI avec un push pull de deux EL504, ensuite de groupe musical en groupe musical, je suis devenu le monsieur Bricol tout des copains , je me suis fait la main une première fois sur un ampli Basse et orgue, comme on disait a l époque, un EKO Super Duke, puis vinrent des Marshall et des Fender, et j ai aussi fait quelques modifs sur mon MusicMan HD 150 en lui mettant une boucle d effet. Mon père possédait aussi tout un attirail d appareils de mesure Vintage (Metrix et autres) que j ai hélas du revendre lorsque je me suis expatrié au Brésil voici 10 ans, j ai mis fin mes activités de bricoleur éclairé avec la généralisation de cette saloperie de circuit imprimé et la miniaturisation qui a eu pour résultat qu il n existe plus (vous êtes une exception)de réparateurs, c est la philosophie du jetable qui a pris le dessus. Tout cela fait que je suis bien d accord avec vos propos, autant il m était aisé de suivre le tracé d un circuit et donc réparer les amplis câblés a l ancienne voire ceux de la toute première génération d ampli a CI , genre Acoustic 360 qui étaient construits en pensant Lampes, avec des composants bien dimensionnés, autant je ne mets pas les pattes dans ces saloperies d amplis miniatures à la mode!!! En tous cas bravo pour votre travail et continuez comme cela, la mode étant un éternel recommencement, cela ne m étonnerait pas qu on en revienne un jour au bons gros amplis d autrefois- (je parle essentiellement en tant que bassistes, qui semblent être une espèce plus délicate que les guitaristes point de vue poids des amplis!! )
Bonjour Laurent, un grand merci pour votre message. Nous avons donc pile poil 30 ans de différence !