☠️⚡ Avant de commencer, une note importante : les appareils équipés de lampes délivrent TOUS des tensions et des courants capables de vous tuer. Ce sont des appareils anciens qui n’offrent en général AUCUNE sécurité pour l’utilisateur. Si vous n’avez aucune notion des dangers que représente l’électricité, n’allez pas plus loin. En tant qu’auteur, je décline toute responsabilité en cas d’utilisation des informations ci-dessous entraînant des dégâts matériels ou des blessures quelconques. ☠️⚡

Pour parler du standby, il faut commencer par expliquer de quoi l’on parle. Et surtout bien tout lire avant d’en tirer des conclusions trop hâtives !

Le standby est un interrupteur présent sur un très grand nombre d’amplis et d’appareils électroniques fonctionnant à l’aide de tubes électroniques. On le retrouve généralement à proximité de l’interrupteur « secteur » qui coupe lui l’alimentation électrique de votre appareil.

Ce petit switch n’a pas toujours le même rôle d’un point de vue purement électronique mais il a toujours la même fonction finale : faire taire votre ampli sans l’éteindre totalement.

D’un point de vue électronique il vient la plupart du temps couper l’alimentation haute tension présente dans l’ampli tout en laissant la tension alternative qui assure le chauffage des lampes. Notez dans un coin de votre tête que pour fonctionner une tube doit être « chaud » afin que sa cathode puisse émettre des électrons (Si vous souhaitez en savoir plus sur le fonctionnement d’une lampe, jetez un œil à mon article sur Reverb.com).

Le résultat ? Les tubes n’étant plus alimentés au niveau de leurs anodes et de leurs grilles l’ampli est aussi muet qu’une armoire normande bien graissée. Basculez de nouveau le standby et l’ampli fonctionne immédiatement grâce à ses tubes déjà préchauffés.

Certains amplis offrent d’autres circuits plus exotiques qui viennent par exemple uniquement couper l’alimentation du tube déphaseur ou déconnecter le point milieu du secondaire du transformateur d’alimentation au niveau de l’enroulement haute tension… pour le même résultat : couper le sifflet à votre ampli d’une façon plus ou moins catholique.

Mais point trop de digressions électroniciennes et taillons dans le lard.

Le standby est-il votre ami ?

Malgré son air séducteur et son rôle alléchant, le standby de la plupart des amplis disponibles sur le marché est nuisible pour celui-ci. Vous l’avez bien lu : nuisible.

Plaît-il ?

Pour un tas de raisons votre standby fait plus de mal que de bien à vos tubes.

Et là, vous viennent en mémoire quantité de théories inverses fondées et gravées dans le marbre 2.0 par des docteurs en forumologie et autres électromanciens auto proclamés en tous genres.

Oui oui, ces mêmes sorciers qui pensent qu’un câble à un sens dans lequel le son « passe mieux ».

Mais laissons les forumeurs forumer. Lorsqu’ils n’en auront plus envie peut-être liront-ils des livres.

Un nid d’em…. de soucis, restons polis.

Le standby pose de multiples problèmes, premièrement il vient commuter (ou « switcher » pour les vrais rockeurs) une tension continue. Ce que déteste passablement un interrupteur puisque se faisant il a la fâcheuse tendance à amorcer (un petit arc électrique se forme lorsqu’on bascule l’interrupteur) et à charbonner, entraînant inévitablement une mort prématurée de la pièce électromécanique en elle-même. Les interrupteurs taillés pour supporter ce genre de maltraitance sont rares et chers et n’équipent pas vos amplis.

Mais là ne s’arrêtent pas les maux. Les experts de forum grimpent aux rideaux et soutiennent mordicus qu’il semblerait (mais alors vraiment), qu’en venant appliquer la haute tension sur un tube qui n’a pas atteint sa température de fonctionnement optimale, on risque de faire « mourir » le tube prématurément en détériorant la cathode de ce dernier.

Tout le monde y va donc de son avis : laisser l’ampli en standby pendant 5 minutes afin de laisser chauffer les tubes, ne le laisser que 15 secondes, ou multiplier l’âge du capitaine par pi etc. On peut même lire, mais alors là c’est rare et souvent le mec doit avoir un coup dans le nez, qu’il faudrait laisser l’ampli en standby avant de l’éteindre pour permettre aux tubes de refroidir. Inutile au possible. Le seul refroidissement utile est celui des tubes une fois l’ampli totalement éteint et avant de le transporter.

Et que faire face à un ampli dépourvu de standby ? De quoi s’emmêler le cerveau…

La réalité

Le danger de détériorer la cathode des tubes est bien réel, si l’on vient appliquer la haute tension avant que la température optimale de fonctionnement ne soit atteinte.

Mais…

Ne vous inquiétez pas. Ce phénomène ne se produit qu’à de très hautes tensions et sous de très forts courants. En gros : il faut envoyer du bois et votre contrat EDF ne le permet pas.

Allez fouiller un peu dans les vieux manuels écrits par les ingénieurs des chez RCA, Sylvania, General Electric, de vrais experts des tubes pour le coup. Et bien personne, dans ces ouvrages, ne parlent de ce phénomène quand il est question des « tubes de réception », contrairement aux « tubes d’émissions » qui eux y sont sensibles, mais on ne les trouves que dans les appareils d’émission radio ou les radars. Vous jouez souvent sur un émetteur radar?

Pas de surprise pour la suite : les tubes tels que la série des 12..7, 6L6, 6V6, EL84, EL34, EF86… sont des « tubes de réception » donc insensibles à ce phénomène à leurs tensions et courants d’utilisation dans nos amplis.

Donc, à part pour quelques amplis très particuliers qui fonctionnent avec des tensions d’anode de plus de 700 volts (Ampeg SVT, quelques rares Marshall et autres Music Man…) et là c’est une histoire de tension maximale admissible des condensateurs de filtrage d’alimentation ou encore certains montages bancaux à base de cathode follower, le standby ne sert à RIEN. À part rendre muet votre ampli, mais ça vous l’aviez compris.

Si vous y tenez vraiment il vaut mieux dans ce cas tout simplement mettre votre volume à zéro ou utiliser une pédale d’accordage pour muter votre ampli.

Surtout que laisser chauffer votre ampli sans haute tension risque de détériorer les tubes au final.

QUOI ? Oui vous avez bien lu, ne partez pas fumer un paquet de Camel sans filtre (c’est d’ailleurs très mauvais pour la santé préférez une bonne tisane) en laissant votre ampli en standby pendant 3h pendant les changements de plateau, il en va du pouvoir émissif de vos cathodes qui se détériore plus connu sous le phénomène de cathode poisoning.

Le cas du tube redresseur

Pour en finir, certains amplis équipés de tubes redresseurs sont particulièrement mal conçus et leur standby est placé entre la redresseuse et le premier condensateur de filtrage ou « réservoir ».

Le crime est alors parfait : le tube est chauffé, prêt à débiter. Le condensateur est vide, prêt à consommer. Lorsqu’on bascule le standby un pic de courant apparaît et entraîne une saturation de la cathode du tube redresseur entraînant (trop) souvent une destruction de ce dernier.

Je disais « pour en finir » mais la liste à charge contre le standby est particulièrement longue…

Cas d’un standby très mal placé, le condensateur réservoir va « pomper » sur la 5U4GA à l’allumage, entrainant sa mort prématurée. Schéma Fender « Super » 5E4-A.

Le cas de la tension de service

Une autre explication peut prendre place ici, elle reste néanmoins d’ordre économique (moins de composants = économie d’échelle), mais doit être prise en compte. Lorsqu’un tube est « froid », c’est-à-dire lorsqu’il n’a pas atteint sa température de fonctionnement, celui-ci ne débite pas de courant. Le fait de ne pas débiter de courant fait qu’à l’allumage, un ampli équipé d’un tube redresseur à chauffage direct ou de diodes de redressement au silicium va appliquer immédiatement une haute tension élevée sur l’ensemble du rail d’alimentation haute tension. Les condensateurs de filtrage peuvent alors recevoir une tension supérieure à leur tension de service pendant quelques secondes. Le standby permet ici d’éviter ce phénomène, on vient appliquer la haute tension une fois les tubes chauds.

Mais c’est quoi la tension de service ? C’est en fait la tension maximale à laquelle le condensateur peut fonctionner sans risque. Dans nos amplis, les condensateurs offrent souvent une tension de service de l’ordre de 450 V à 500 V. Il faut néanmoins savoir qu’un condensateur supportera sans bronché un dépassement de cette valeur pendant quelques secondes, c’est ce qu’on appelle la tension « surge voltage ». Pour prendre l’exemple de condensateurs courants (et excellents) tels que ceux fabriqués par Fischer & Tausche, voici ces caractéristiques :

On voit qu’au-dessus de 315 V de tension de service la tension maximale sera de 1,1 x la tension de service (rated voltage range). Dans le cas d’un condensateur de 500 V, on peut donc « monter » à 550 V, ce qui laisse une marge raisonnable.

Quoi qu’il en soit, dans les amplis qui mettent en jeu des tensions plus élevées, on n’y va pas par quatre-chemins et on monte les condensateurs en série ce qui a pour effet de diviser leur valeur par 2 et de multiplier leur tension de service par 2. On a donc, avec deux condensateurs de 500 V montés en série une tension de service de 1 000 V et une tension maximale de 1 100 V. Donc, à moins d’avoir un tube de radar dans votre ampli, vous êtes tranquille. 

Mais alors pourquoi ?

Mais alors, pourquoi les grandes marques ajoutent un standy sur leurs amplis ?

Voici un début d’explication : Fender sort au début des années 50 son Bassman 5E6, équipé d’un standby. Très certainement pour protéger les condensateurs de filtrage du pic de tension qui apparaît avant que les tubes de l’ampli ne se mettent à débiter du courant tout en abaissant la haute tension anodique. On en a déjà parlé.

Schéma du Fender Bassman 5E6

Argument à creuser, il semblerait qu’effectivement la tension peak puisse être brièvement dépassée lorsque les tubes ne débitent pas. Pour en avoir le cœur net j’ai réalisé une simulation, au plus proche du schéma ci-dessus de l’alimentation du Bassman 5E6 :

On peut voir que la tension maximale atteinte est de 511 V. Une 5U4GA met environ 1 à 1,5 seconde avant de débiter. Dans la simulation, les autres tubes se mettent à débiter au bout de 2 secondes, ce qui laisse donc une marge. Bien sûr, c’est une simulation et j’aimerai mettre la main sur un vrai 5E6 pour faire des mesures. Affaire à suivre…

Autre hypothèse : est-ce le fait que Fender utilise dans ce modèle un montage cathode follower qui a tendance à présenter un phénomène d’arc à l’allumage entre grille et cathode ?

Quoi qu’il en soit, notre standby est là et creuse son trou des deux côté de l’Atlantique.

Quelques années plus tard un certain Jim Marshall sort son JTM45, qui est une copie très proche du Bassman. Il ajoute donc également un standby.

Le premier JTM45 Marshall

On se retrouve donc avec les deux plus grands constructeurs d’amplis au monde qui ajoutent des standby sur leurs amplis, les musiciens trouvent ça très pratique de pouvoir couper le son de leur ampli sans toucher aux réglages…

Vox, qui à l’époque n’équipe aucun de ses amplis avec un standby, se met à en ajouter sur leurs amplis. Faudrait pas rester à la traîne de la concurrence ! La boucle est bouclée et tout le monde se met à ajouter des standby, sans raison…

Votre ampli n’a pas de standby ? Tant mieux.

Mais alors, que faire avec un ampli équipé d’un standby ? Lors de l’allumage, basculez l’interrupteur secteur (on/off) puis patientez 5 secondes. Cela permettra à certains tubes de déjà débiter et d’éviter un pic de tension qui pourrait être préjudiciable aux condensateurs de filtrage dans un ampli mal designé ou trop ancien. Pour éteindre votre ampli : basculez les deux interrupteurs en même temps, ça n’a pas d’importance.

Vous avez un doute? Écrivez-moi.

Pensez également que laisser votre ampli sur standby pendant des heures est très mauvais pour vos tubes.

Références:

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